Dans un contexte de tractations diplomatiques complexes et d’intérêts nationaux conflictuels, la candidature de Mahamoud Ali Youssouf, ministre des Affaires étrangères de Djibouti, à la présidence de la Commission de l’Union africaine (UA) soulève de nombreuses questions. Alors que Mahamoud Ali Youssouf ambitionne de se positionner à la tête de l’organisation continentale, des révélations sur des marchandages politiques, des rivalités régionales et des discussions secrètes jettent une lumière crue sur la diplomatie en coulisse dans la région.
- Qui est Mahamoud Ali Youssouf ?
Mahamoud Ali Youssouf est une figure de la diplomatie djiboutienne. Titulaire du poste de ministre des Affaires étrangères depuis plus de deux décennies, il s’est imposé comme un acteur clé des relations internationales de son pays. Polyglotte maîtrisant le français, l’anglais et l’arabe, il est apprécié pour sa connaissance approfondie des dynamiques politiques en Afrique et au sein de l’UA.
Sous sa direction, Djibouti avait l’occasion de renforcer sa position stratégique dans la Corne de l’Afrique, mais Mahamoud Ali Youssouf n’a jamais eu la possibilité de placer l’intérêt national avant ceux de la famille de Guelleh.
- Pourquoi Guelleh a-t-il saboté la candidature de Fawzia Yusuf Adam ?
La candidature de Fawzia Yusuf Adam, ancienne vice-Première ministre et actuelle parlementaire somalienne, a été perçue comme une menace par le régime de Guelleh. En tant que voisine et partenaire stratégique, la Somalie aurait pu bénéficier d’un soutien régional pour cette élection, renforçant ainsi son poids diplomatique. Cependant, le régime d’Ismaïl Omar Guelleh a joué un rôle actif pour affaiblir cette candidature.
Dans une interview à la presse, madame Fawzia Yusuf Adam avait indiqué que Guelleh a exercé une pression directe sur le président somalien Hassan Sheikh Mohamud pour qu’il retire son soutien à Fawzia Yusuf Adam. En échange, le régime djiboutien aurait promis un appui politique et des avantages économiques. Cette manœuvre, vue comme une trahison par la Somalie, a alimenté la colère des somaliens à l’égard d’Ismaël Omar Guelleh. Lien : Somalia candidate drops out of African Union race (garoweonline.com)
- Comment le régime djiboutien marchande-t-il le retrait potentiel de Mahamoud Ali Youssouf ?
Dans un développement récent, des discussions secrètes entre Djibouti et le Kenya révèlent une stratégie de marchandage menée par le régime de Guelleh. Djibouti envisagerait de retirer la candidature de Mahamoud Ali Youssouf à la présidence de la Commission de l’Union Africaine en échange de concessions importantes de la part du Kenya. Parmi les demandes figurent :
- Une compensation financière estimée entre 70 et 100 millions de dollars.
- Des parts dans des entreprises actives dans les ports kényans, notamment dans les secteurs du dépôt et du fret général.
- Un soutien politique de Nairobi pour renforcer la position du régime de Guelleh.
Ces négociations mettent en lumière l’usage des candidatures internationales comme levier de négociation pour obtenir des gains économiques et politiques pour les familles des hauts responsables de l’état.
- Comment Mogadiscio a appris les discussions secrètes entre Djibouti et Nairobi, et quelle a été la réaction somalienne ?
La découverte des discussions secrètes entre Djibouti et le Kenya a été un choc pour la Somalie. Ce sont des informateurs somaliens bien placés à Djibouti, notamment l’individu nommé Saadiq, qui auraient alerté Mogadiscio de ces négociations. Cette révélation a suscité l’indignation parmi les dirigeants somaliens.
Des parlementaires et des responsables proches de Villa Somalia ont exprimé leur colère, qualifiant les actions de Guelleh de « poignard dans le dos ». Ils reprochent au régime djiboutien d’avoir monnayé son soutien contre des intérêts économiques et de porter atteinte à la solidarité régionale.
- Les sociétés du régime djiboutien dans les ports kényans : une menace pour la transparence ?
Si le régime Djibouti obtient des parts dans les ports kényans en contrepartie du retrait de la candidature de Mahamoud Ali Youssouf, cela pourrait poser des risques pour la transparence et la réputation du secteur portuaire kenyan. Les ports de la région jouent un rôle crucial dans le commerce international, et toute implication d’entreprises liées au régime mafieux de Guelleh pourrait alimenter les soupçons d’activités illicites, notamment :
- Le blanchiment d’argent.
- Les trafics en tout genre.
- L’influence politique sur des secteurs stratégiques.
Pour le Kenya, cela pourrait ternir son image d’acteur économique clé en Afrique de l’Est. Les critiques estiment que ces accords risquent de compromettre la gouvernance dans les infrastructures portuaires.
Conclusion : Quels enjeux pour l’Union Africaine et la région ?
La candidature de Mahamoud Ali Youssouf illustre les rivalités régionales et les jeux d’influence au sein de l’Union africaine. Les tractations secrètes, les sabotages de candidatures et les marchandages économiques témoignent de l’importance stratégique de la présidence de la Commission de l’UA.
Le Kenya et Djibouti, tout en rivalisant pour la direction de l’UA, semblent aussi prêts à coopérer pour des intérêts mutuels, ce qui complexifie davantage le paysage diplomatique. La Somalie, quant à elle, se retrouve marginalisée et trahie, ce qui pourrait avoir des répercussions durables sur les relations dans la Corne de l’Afrique.
L’élection de février 2025 sera cruciale pour définir non seulement l’avenir de l’UA, mais aussi l’équilibre des forces dans une région où la diplomatie reste un jeu d’échecs à haut risque.
Hassan Cher
À suivre …
The English translation of the article in French.
Djibouti/African Union/Kenya: will Mahmoud Ali Youssouf withdraw his candidacy for the chairmanship of the AU Commission?
Against a backdrop of complex diplomatic dealings and conflicting national interests, the candidacy of Djibouti’s Minister of Foreign Affairs, Mahmoud Ali Youssouf, for the presidency of the African Union Commission raises many questions. As he seeks to position himself at the helm of the continental organization, revelations of political dealings, regional rivalries and secret discussions shed light on the behind-the-scenes diplomacy in the region.
- Who is Mahmoud Ali Yusuf?
Mahmoud Ali Yusuf is an emblematic figure in Djiboutian diplomacy. Minister of Foreign Affairs for over twenty years, he has established himself as a key player in his country’s international relations. A polyglot fluent in French, English and Arabic, he is recognized for his in-depth knowledge of political dynamics in Africa and within the African Union.
Under his leadership, Djibouti has had the opportunity to strengthen its strategic position in the Horn of Africa, but Mahmoud Ali Yusuf has not had the opportunity to put the national interest ahead of the interests of the family of his generation.
- Why did Guelleh sabotage Fawzia Youssouf Adam’s candidacy?
The candidacy of Fawzia Youssouf Adam, former Deputy Prime Minister and current Deputy Prime Minister of the Republic of Yemen, was sabotaged by Guelleh. As a neighbor and strategic partner, Somalia could have benefited from regional support for this election, strengthening its diplomatic weight. However, Ismaïl Omar Guelleh’s regime played an active role in weakening this candidacy.
In a press interview, Madame Fawzia Yusuf Adam indicated that Guelleh had exerted direct pressure on Somali President Hassan Sheikh Mohamud to withdraw his support for Fawzia Yusuf Adam. In exchange, the Djibouti regime is said to have promised political support and economic benefits. This maneuver, seen as a betrayal by Somalia, fueled Somali anger towards Ismaël Omar Guelleh. Link : Somalia candidate drops out of African Union race (garoweonline.com)
- How is the Djibouti regime haggling over the potential withdrawal of Mahamoud Ali Youssouf?
In a recent development, secret discussions between Djibouti and Kenya reveal a bargaining strategy pursued by the Guelleh regime. Djibouti is reportedly considering withdrawing Mahamoud Ali Youssouf’s candidacy for the presidency of the African Union Commission in exchange for significant concessions from Kenya. Demands include
– Financial compensation estimated at between $70 and $100 million.
– Shares in companies operating in Kenyan ports, particularly in the depot and general cargo sectors.
– Political support from Nairobi to strengthen the position of the Guelleh regime.
These negotiations highlight the use of international candidatures as negotiating leverage to secure economic and political gains for the families of senior state officials.
- How did Mogadishu learn of the secret talks between Djibouti and Nairobi, and what was the Somali reaction?
The discovery of the secret talks between Djibouti and Kenya came as a shock to Somalia. It was well-placed Somali informers in Djibouti, notably the individual named Saadiq, who allegedly alerted Mogadishu to these negotiations. This revelation sparked outrage among Somali leaders.
Parliamentarians and officials close to Villa Somalia expressed their anger, describing Guelleh’s actions as a “stab in the back”. They accused the Djiboutian regime of trading its support for economic interests and undermining regional solidarity.
- Djibouti regime companies in Kenyan ports: a threat to transparency?
If the Djibouti regime obtains shares in Kenyan ports in return for withdrawing Mahamoud Ali Youssouf’s candidacy, this could pose risks for the transparency and reputation of the Kenyan port sector. The region’s ports play a crucial role in international trade, and any involvement of companies linked to Guelleh’s mafia regime could fuel suspicions of illicit activities, including:
– Money laundering.
– Trafficking of all kinds.
– Political influence in strategic sectors.
For Kenya, this could tarnish its image as a key economic player in East Africa. Critics believe that these agreements risk compromising governance in port infrastructures.
Conclusion: What’s at stake for the African Union and the region?
Mahamoud Ali Youssouf’s candidacy illustrates the regional rivalries and games of influence within the African Union. Secret dealings, sabotage of candidacies and economic haggling bear witness to the strategic importance of the AU Commission chairmanship.
Kenya and Djibouti, while vying for leadership of the AU, also appear ready to cooperate in mutual interests, further complicating the diplomatic landscape. Somalia, meanwhile, finds itself marginalized and betrayed, which could have lasting repercussions on relations in the Horn of Africa.
The February 2025 election will be crucial in defining not only the future of the AU, but also the balance of power in a region where diplomacy remains a high-risk game of chess.
Hassan Cher
To be continued…
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