Ce n’est pas un secret, le président de la République fédérale de Somalie, Hassan Sheikh Mahmoud, est un ami proche d’un certain Ismail Omar Guelleh (IOG), le président dictateur de Djibouti. Ce dernier est largement considéré comme son mentor politique. Selon de nombreuses sources, Guelleh l’a soutenu dans son arrivée au pouvoir en 2012, dans sa féroce opposition au président Mohamed Abdullahi Mohamed dit Farmajo comme dans sa réélection du 15 mai 2022 face à ce dernier. Il n’a guère lésiné, dit-on, sur les moyens, notamment en termes de ressources financières mal acquises, pour l’appuyer. D’ailleurs, IOG a publiquement exprimé sa satisfaction de le voir revenir au pouvoir, le félicitant ‘’d’avoir abattu une montagne’’, faisant allusion à Farmajo. En privé, il arrive à l’autocrate djiboutien de se réjouir de la ‘’docilité’’ de l’homme à son égard. ‘’Il est tout à moi’’, susurrerait-il en petit comité.
Alors, du changement dans ce tableau qu’Ismail Omar Guelleh vivrait comme idyllique ? D’après certains observateurs, la lune de miel ‘’politique’’ entre les deux hommes connaît des turbulences. Ils illustrent cette évolution par un événement récemment intervenu en Somalie : la nomination d’un nouveau directeur à la tête de l’Agence nationale de renseignement et de sécurité (National intelligence and Security Agency). Alors que Guelleh s’attendait à la promotion de son gendre Sadik Omar Hassan dit Sadik John, le président Hassan Sheikh Mahamoud a choisi, le 4 avril 2024, Abdullahi Mohamed Ali dit Sanbalooshe pour remplacer Mahad Mohamed Salad. Cela aurait fortement déçu le gendre Sadik John et son beau-père Guelleh.
Il semble que le dictateur djiboutien considérait NISA comme un tremplin pour la conquête du pouvoir fédéral somalien par son gendre, après l’actuel mandat de Hassan Sheikh Mahamoud. Ce dernier aurait donc torpillé ce projet qu’il aurait perçu comme une menace pour sa propre intention de se succéder à lui-même et de demeurer à la Villa Somalia aussi longtemps que possible. Le tandem Sadick John-Guelleh aurait alors juré de se venger.
Ainsi, nos sources voient dans l’annonce mardi 9 avril 2024 de la candidature du ministre djiboutien des affaires étrangères, Mahamoud Ali Youssouf, à la présidence de la Commission Africaine comme le premier acte de cette vengeance. En effet, à ce poste tournant, qui revient cette fois à l’Afrique de l’Est, le président Hassan Sheikh Mahamoud présentait déjà son ancienne ministre des affaires étrangères, Fozia Youssouf Hadji Aden, et comptait sur Djibouti pour la soutenir face à l’opposant kenyan Raila Odinga, très appuyé par Nairobi qui mobilise ses amitiés africaines. La candidature djiboutienne fragilise donc celle somalienne et par ricochet l’ambition régionale de Hassan Sheik Mahamoud.
Pour qui connaît Ismail Omar Guelleh, un tel revirement n’est pas étonnant. L’homme n’a de respect que pour ses intérêts particuliers. Ne compte pour lui que ce que sa personne ou sa famille gagne.
Alors, à son tour, Hassan Sheikh Mahamoud commence-t-il à apprendre cela à ses dépens ?