A Djibouti, un message est récemment tombé sur les téléphones portables des abonnés de la société d’État Djibouti-Télécom, opérateur unique des télécommunications dans ce pays. Le texte émanait de ce que le pouvoir en place appelle ‘’Commission nationale indépendante pour la prévention et la lutte contre la corruption (CNIPLC)’’. Le message était ainsi exprimé : ‘’Le 9 décembre, nous célébrons la Journée Internationale de Lutte contre la Corruption. SOYONS UNI (E)S CONTRE LA CORRUPTION’’.
Non, vous n’avez pas rêvé. C’est bien un message du régime du président Ismail Omar Guelleh et c’est bien à Djibouti. Oui, Djibouti, paradis de la corruption, dégradé à ce point par le président de la République, sa famille et ses courtisans
Vous l’imaginez aisément, les destinataires n’en ont pas cru leurs yeux. Ils ont dû relire le message plus d’une fois pour réaliser qu’il est bien là, envoyé par la CNIPLC. Puis, ils ont dû se demander à quel jeu joue le régime incorrigiblement corrompu d’Ismail Omar Guelleh ? A quoi a-t-elle voulu jouer, en effet, la présidente de la vraie fausse CNIPLC et troisième titulaire de la fonction depuis la création, il y a des années, de cet organisme qui n’a jamais fait son travail ? A-t-elle agi de sa propre initiative pour rappeler qu’elle porte un titre, perçoit une rémunération, compte un certain nombre de subordonnés et dispose d’un budget ? Ou a-t-elle agi sur instructions du roi de la corruption, Ismail Omar Guelleh, las de son image pourtant justifiée de corrompu ?
En réalité, les Djiboutiens et autres consciences observatrices ont répondu au message par un sourire de mépris. Ils ont vite conclu à la plaisanterie de mauvais goût. ‘’Comme grosse blague, il y a mieux ! ’’, se sont exclamés de nombreux hauts fonctionnaires à la retraite. Ils savent de quoi ils parlent puisqu’ils connaissent les arcanes et les pratiques du pouvoir en place. ‘’C’est comme si l’hyène disait partir en guerre contre la prédation du bétail !’’, a, pour sa part, assené un groupe d’abatteurs de bétail dont des proches d’Ismail Omar Guelleh ont confisqué le gagne-riz au Parc à bestiaux de Balbala, la banlieue de Djibouti-ville. En effet, un prédateur, ici l’hyène qui symbolise le corrompu, ne combat pas la prédation puisqu’il en vit.
A ce sujet, il est une fable djiboutienne qui retient notre attention. Un jour, lassée d’être mal vue par les éleveurs, l’hyène a tenté un coup de communication. Elle a solennellement déclaré aux pasteurs nomades qu’elle avait une bonne nouvelle pour eux. Elle a raconté qu’elle avait changé de régime alimentaire et de nom. Elle a précisé qu’elle ne s’attaquait plus aux bêtes, qu’elle pouvait même les garder sans la moindre tentation et que, dès lors, elle méritait le nom d’Amin qui signifie ‘’Digne de confiance’’. Bien entendu, personne ne l’a prise au sérieux, tout le monde pensant que c’était une mauvaise plaisanterie. Mais elle a insisté tant et si bien qu’une chance lui a été accordée. Rapidement, elle a été mise à l’épreuve avec la garde d’un troupeau de moutons et de chèvres. Lorsqu’elle s’est retrouvée seule avec les bêtes, elle n’a pas pu se retenir et a planté ses crocs dans la chair d’un mouton. Surprise en train de le dévorer, elle a eu ces mots mémorables avant de s’enfuir : ‘’Je reste hyène, de nature comme de nom’’. Les éleveurs ont regretté de lui avoir fait confiance.
De la même manière, qui peut croire nos gouvernants corrompus, lorsqu’ils affirment lutter contre la corruption. A l’instar de l’hyène de la fable, ils restent corrompus de nature comme de nom.
Moralité, tout être humain reste, au-delà du discours, ce qu’il est.
Alors, halte à la mauvaise plaisanterie, Madame la présidente de la vraie fausse commission anti-corruption. Et fille du général Zakaria Cheikh Ibrahim, chef d’état-major de l’armée de Djibouti !