Le terrorisme, la géopolitique et les interactions régionales en Afrique de l’Est font l’objet de tensions grandissantes. Les récentes attaques de Daesh à Puntland, l’implication d’acteurs financiers comme Salaam et les relations controversées de Djibouti avec les groupes terroristes sont des sujets préoccupants, qui soulèvent d’importantes questions sur la stabilité de la région.
Daesh Somalie et Salaam Bank : un lien inquiétant
Le 31 décembre 2024, un groupe de terroristes affiliés à Daesh a attaqué la base militaire des Forces de défense du Puntland à Dharjale. Dans le cadre de cette attaque, les forces de Puntland ont découvert une feuille provenant de Salaam Bank, une institution bancaire opérant en Somalie. Ce document, trouvé dans la poche d’un combattant de Daesh tué lors des combats, a suscité de nombreuses interrogations sur un lien possible entre le groupe terroriste et la banque.
Le contenu de la feuille, rédigé dans un style arabe sommaire, incitait à la violence et à la lutte contre les « mécréants » vivant au Puntland. Ce genre de propagande, habituellement associé à des groupes terroristes comme Daesh, soulève des inquiétudes sur les réseaux financiers utilisés par ces groupes pour financer leurs activités. Le fait que le document soit émis depuis une branche de Salaam Bank au Puntland semble suggérer que l’institution pourrait être indirectement impliquée, bien que les détails restent flous et nécessitent une enquête approfondie.
Des experts somaliens soulignent que ce document ne semblait pas avoir été écrit par un arabe natif. Cela pourrait indiquer que l’auteur était un Somali maîtrisant maladroitement la langue arabe, mais cela n’exclut pas un lien direct entre les groupes terroristes et la banque. L’établissement pourrait, en théorie, servir de couverture ou de point de contact pour les transactions illégales utilisées pour financer les opérations terroristes. Les autorités du Puntland ont précisé qu’elles poursuivaient leurs recherches sur cette question.
Le contenu de la feuille dit comme ceci : ‘DIEU est le créateur de tout ! Eh les combattants de DIEU qui sont là, monsieur Oubed Ben-Salaam et les moudjahidines, je vous recommande de tuer et de brûler tous les mécréants vivant dans notre pays, Puntland. Vous irez au paradis après avoir accompli votre devoir et les mécréants iront à l’enfer. Masha-Allah.’ Lien : https://youtu.be/Wyh1KEwgs_4?si=xpyiku7d8dp2PDVD
Ce qui est étrange dans cette affaire, c’est le lien entre ce document de Salaam Bank Puntland et ce message de Daesh Somalie. »
Le chef de Daesh Somalie, Sheikh Abdulqadir Mumin, et ses liens avec Djibouti
Un autre aspect complexe du dossier concerne les relations entre Sheikh Abdulqadir Mumin, le leader de Daesh en Somalie, et Djibouti. Selon des informations révélées par des conseillers de la présidence djiboutienne, Mumin aurait été soigné à Djibouti en mai 2019, après avoir été gravement malade dans les montagnes de Galgala, dans le Puntland. Ce séjour a été rendu possible grâce à une autorisation explicite du régime djiboutien.
Mumin, ancien membre d’Al-Shabaab, avait pris la tête de la faction somalienne de Daesh après avoir juré allégeance à l’État islamique en 2015. Lors de son passage à Djibouti, il a été escorté par des combattants de Daesh et des membres de la garde républicaine djiboutienne, recevant des soins médicaux dans des établissements tels que l’hôpital Peltier et l’hôpital militaire « Omar Hassan El-Béchir ». Après son rétablissement, il aurait reçu un paquet d’argent et aurait quitté Djibouti dans des conditions qui suggèrent une collaboration tacite entre certains responsables djiboutiens et les éléments du groupe terroriste.
Ce lien entre Mumin et Djibouti soulève des questions sur les politiques de sécurité et les relations diplomatiques entre le pays et les groupes djihadistes. L’isolement de Mumin en Djibouti semble avoir été facilité par les autorités locales, bien que la situation soit encore floue quant à l’implication directe de l’État djiboutien. Ce type de traitement réservé à un leader terroriste est préoccupant, surtout dans un contexte où Djibouti est un acteur clé dans la lutte contre le terrorisme dans la région.
L’attaque de Dharjale : Une escalade de Daesh Somalie
L’attaque de Daesh à la base militaire de Dharjale représente une nouvelle étape dans l’escalade des violences en Somalie. Le groupe terroriste a utilisé une voiture piégée suivie d’une attaque directe contre le commandement de la base. L’attaque a tué au moins quatre soldats et blessé plusieurs autres. Ce type d’assaut, combinant explosifs et combats au sol, est devenu la signature de Daesh dans la région, qui cherche à étendre son influence et à semer la terreur dans les zones stratégiques.
Les raisons de cette attaque semblent être en lien avec la préparation des Forces de défense du Puntland à entrer dans les grottes de Calmikaad, une zone considérée comme un bastion important pour Daesh. L’attaque visait donc à perturber les plans militaires du Puntland, tout en envoyant un message de défiance envers les autorités locales. L’implication d’étrangers dans les combats, notamment des Syriens, des Libyens et des Éthiopiens, démontre également l’ampleur internationale du réseau de Daesh en Somalie.
Les récentes informations sur les membres de Daesh capturés ou tués à Dharjale mettent en lumière l’origine internationale de certains combattants, ce qui complique davantage la lutte contre ce groupe terroriste. La présence de membres étrangers dans les rangs de Daesh souligne l’importance de la coordination internationale pour endiguer cette menace transnationale.
Conclusion
L’attaque de Daesh à Dharjale, le lien troublant avec Salaam Bank et les relations controversées entre Djibouti et le groupe terroriste, mettent en lumière des dynamiques complexes dans la région de la Corne de l’Afrique. Si l’implication de Salaam Bank dans les activités terroristes demeure à ce jour spéculative, les récentes révélations sur le passage de Sheikh Abdulqadir Mumin à Djibouti et l’attaque de Daesh à Puntland montrent clairement que les réseaux terroristes, leur financement et leur stratégie militaire sont de plus en plus interconnectés à l’échelle régionale et internationale.
Il est crucial que les autorités somaliennes, djiboutiennes et les autres nations concernées intensifient leurs efforts de coopération pour démanteler ces réseaux et prévenir de nouvelles escalades de violence. Les liens entre les groupes terroristes et certains acteurs financiers ou politiques pourraient jouer un rôle clé dans cette lutte contre le terrorisme.
Hassan Cher
English translation of the article in French.
Daesh in the Horn of Africa: Analysis of the links between Daesh Somalia, Salaam Bank and Djibouti, a complex situation.
Terrorism, geopolitics and regional interactions in East Africa are the subject of growing tensions. The recent Daesh attacks in Puntland, the involvement of financial players such as Salaam and Djibouti’s controversial relations with terrorist groups are worrying subjects, raising important questions about the region’s stability.
Daesh Somalia and Salaam Bank: a worrying link
On December 31, 2024, a group of Daesh-affiliated terrorists attacked the Puntland Defense Forces military base in Dharjale. As part of this attack, Puntland forces discovered a sheet of paper from Salaam Bank, a banking institution operating in Somalia. The document, found in the pocket of a Daesh fighter killed in the fighting, raised many questions about a possible link between the terrorist group and the bank.
The contents of the sheet, written in a crude Arabic style, incited violence and the fight against “miscreants” living in Puntland. This type of propaganda, usually associated with terrorist groups such as Daesh, raises concerns about the financial networks used by these groups to fund their activities.
The fact that the document was issued from a Salaam Bank branch in Puntland seems to suggest that the institution may be indirectly involved, although the details remain unclear and require further investigation.
Somali experts point out that the document did not appear to have been written by a native Arab. This could indicate that the author was a Somali with an awkward command of the Arabic language, but it does not rule out a direct link between the terrorist groups and the bank. The establishment could, in theory, serve as a cover or point of contact for illegal transactions used to finance terrorist operations. The Puntland authorities said they were continuing to investigate the matter.
The contents of the sheet read as follows: ‘GOD is the creator of everything! Hey fighters of GOD who are here, Mr. Oubed Ben-Salaam and the Mujahideen, I recommend you to kill and burn all unbelievers living in our country, Puntland. You will go to paradise after fulfilling your duty and the miscreants will go to hell. Masha-Allah.’ Link: https://youtu.be/Wyh1KEwgs_4?si=xpyiku7d8dp2PDVD
What’s strange about this case is the link between this document from Salaam Bank Puntland and this message from Daesh Somalia.”
Daesh Somalia leader Sheikh Abdulqadir Mumin and his links with Djibouti
Another complex aspect of the case concerns relations between Sheikh Abdulqadir Mumin, the Daesh leader in Somalia, and Djibouti. According to information revealed by advisors to the Djiboutian presidency, Mumin was treated in Djibouti in May 2019, after becoming seriously ill in the Galgala mountains in Puntland. This stay was made possible thanks to explicit authorization from Djibouti’s presidency.
Mumin, a former member of Al-Shabaab, had taken over the leadership of the Somali faction of Daesh after swearing allegiance to the Islamic State in 2015. During his time in Djibouti, he was escorted by Daesh fighters and members of the Djibouti Republican Guard, receiving medical treatment in establishments such as the Peltier Hospital and the “Omar Hassan El-Béchir” Military Hospital. After his recovery, he reportedly received a package of money and left Djibouti under conditions that suggest tacit collaboration between certain Djiboutian officials and elements of the terrorist group.
This link between Mumin and Djibouti raises questions about security policies and diplomatic relations between the country and jihadist groups. Mumin’s isolation in Djibouti appears to have been facilitated by local authorities, although it remains unclear whether the Djiboutian state was directly involved. This kind of treatment of a terrorist leader is worrying, especially in a context where Djibouti is a key player in the fight against terrorism in the region.
The Dharjale attack: an escalation by Daesh Somalia
The Daesh attack on the Dharjale military base represents a new stage in the escalation of violence in Somalia. The terrorist group used a car bomb followed by a direct attack on the base command. The attack killed at least four soldiers and wounded several others. This type of assault, combining explosives and ground combat, has become Daesh’s signature in the region, as it seeks to extend its influence and spread terror in strategic areas.
The reasons for the attack appear to be linked to the Puntland Defense Forces’ preparations to enter the Calmikaad caves, an area considered an important stronghold for Daesh. The attack was therefore aimed at disrupting Puntland’s military plans, while sending a message of defiance to the local authorities. The involvement of foreigners in the fighting, including Syrians, Libyans and Ethiopians, also demonstrates the international scope of the Daesh network in Somalia.
Recent reports of Daesh members captured or killed in Dharjale highlight the international origin of some fighters, further complicating the fight against this terrorist group. The presence of foreign members in the ranks of Daesh underlines the importance of international coordination in containing this transnational threat.
Conclusion
The Daesh attack in Dharjale, the troubling link with Salaam Bank and the controversial relationship between Djibouti and the terrorist group, highlight complex dynamics in the Horn of Africa region. While Salaam Bank’s involvement in terrorist activities remains speculative to this day, recent revelations about Sheikh Abdulqadir Mumin’s passage to Djibouti and Daesh’s attack in Puntland clearly show that terrorist networks, their financing and their military strategy are increasingly interconnected on a regional and international scale.
It is crucial that the Somali and Djiboutian authorities and other concerned nations step up their cooperative efforts to dismantle these networks and prevent further escalations of violence. Links between terrorist groups and certain financial or political players could play a key role in this fight against terrorism.
Hassan Cher
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